A l’occasion de l’an II du Président de la République à la Magistrature Suprême, le Ministre de la Santé Publique, de la Population et des Affaires Sociales, Dr Illiassou IDI Maïnassara a accepté d’accorder à la rédaction de LA ROUE DE L’HISTOIRE une interview. Le Ministre de la santé à répondu, indicateurs à l’appui les différents progrès réalisés par son département ministériel et les perspectives pour les prochaines années.
La Roue de l’Histoire : Monsieur le Ministre, l’un des engagements du Président de la République en matière de santé est d’améliorer l’accès et la qualité des services de soins de santé. Qu’est-ce que votre département ministériel a fait dans ce sens au cours des deux premières années du mandat du Président Mohamed Bazoum ?
Merci beaucoup, permettez-moi tout d’abord de vous partager le sentiment personnel qui m’anime celui d’une grande fierté, notamment de travailler avec une personnalité hors pair qu’est SE le Président de la République Monsieur BAZOUM Mohamed et qu’au passage le remercier pour m’avoir renouvelé sa confiance afin de poursuivre mes fonctions ; Et cela pour cette une immense et exaltante mission, celle d’avoir comme charge la santé de la population de nos concitoyens, tâche complexe s’il en est parce que l'enjeu est énorme ;
Cela dit pour améliorer l’accès et la qualité des services de soins de santé, mon département ministériel s’est attelé à apporter des réponses ces deux dernières années aux défis que je connais bien en tant que Médecin praticien notamment les défis de la couverture sanitaire et de la fonctionnalité des structures de santé pour qu’elles puissent assurer pleinement leurs missions d’offre de services de qualité. Cela à travers notamment la poursuite de construction/transformation des cases de santé en Centre de Santé Intégré ayant permis un bon significatif de 52,68 % à 54,47 % entre 2020 et 2022 d’accès aux soins pour les populations dans un rayon de 0-5 Km ;
Rehausser cet indicateur était un objectif majeur, inscrit dans le Programme de Renaissance du Président de la République acte III et parallèlement nous poursuivons la réhabilitation des infrastructures sanitaires, le renforcement des plateaux techniques, le renforcement du système de maintenance ainsi que l’organisation à tous les niveaux des sorties foraines et mobiles de manière constante afin de permettre aux populations éloignées de jouir de leur droit d’accès à la santé et cela grâce au renforcement des moyens de transport notamment les véhicules utilitaires, les ambulances et les motos.
Un certain nombre de réalisations ont été enregistrées durant ces deux (02), notamment la dotation de 93% des CSI en matériel informatique et connexion en vue notamment de faciliter la remontée des données et de renforcer le système d’information sanitaire. Les moyens mis à disposition dans le cadre de la réponse au COVID-19 ont également permis de mettre à niveau certains plateaux techniques de soins ou d’analyse et de laboratoire.
En somme tout cela a permis de rehausser le pourcentage de structures de santé pleinement fonctionnelles de 78% en 2020 à 87 % en 2022.
La disponibilité des médicaments et des autres produits de santé a été nettement satisfaisante en raison de la réduction du taux de ruptures de molécules observées à tous les niveaux et cela grâce à la refonte du système d’approvisionnement national notamment :
- le renforcement de la gouvernance à travers la coordination des acteurs et des activités, la mise en place d’un cadre réglementaire adéquat ayant débouché à la création d’une Agence du Médicament, et un suivi rigoureux des activités ;
- la distribution au dernier Kilomètre pour permettre l’équité dans la distribution des produits de santé en couvrant l’ensemble du territoire national ;
- la traçabilité, la transparence et la redevabilité à travers le Système d’Information et de Gestion Logistique (SIGL).
Concernant la qualité de prestation de soins et services, au moment où le Niger s’engage à atteindre la couverture sanitaire universelle d’ici 2030, l’amélioration de la qualité des soins et services figure parmi les priorités, plusieurs approches sont développées dans ce sens.
La Roue de l’Histoire : La santé de la reproduction a été aussi une préoccupation majeure du gouvernement. Quelles sont les avancées enregistrées dans ce domaine ?
Au cours des dernières années, le Niger a réalisé des progrès considérables en matière de santé et de nutrition maternelle et infantile. La couverture des services essentiels s’est améliorée, et davantage d’enfants ont été immunisés et ont bénéficié d’interventions axées sur la nutrition.
Tous les acteurs réaffirment leurs engagements en faveur de résultats de santé de qualité équitable, en matière de sexualité et de procréation, pour les mères, les nouveau-nés, les enfants et les adolescente ; La réalisation des objectifs fixés en matière de santé reproductive a été facilité par le renforcement de la santé communautaire : L’accent a été mis sur la constitution de systèmes de santé communautaire plus résilients et cela, à travers la formation continue des professionnels de santé compétents, l’augmentation et l’encadrement de nombreux relais communautaires facilitant la sensibilisation de proximité et la référence des femmes et enfants vers les centres de santé.
Ainsi, le taux des accouchements assistés en milieu institutionnel est passé de 35,2 % en 2020 à 38,77 % en 2022, et le nombre de femmes bénéficiant de quatre (04) consultations prénatales s’est nettement améliorée pendant la même période. Aujourd’hui, le nombre d’enfants bénéficiant d’une immunisation complète a atteint 90 %. De 2020 à 2022, la létalité obstétricale intra hospitalière est passée de 0,38 % à 0,16 % et la mortalité néonatale avait baissé de moitié.
Aussi, on retient qu’au cours de ces deux années des progrès significatifs en matière de santé sexuelle notamment des moyens de contraception qui sont devenus facilement accessibles, une nette amélioration de la qualité des soins, la plupart des décès maternels peuvent aujourd’hui être évités grâce aux progrès importants en matière de survie maternelle, les sage-femmes qualifiées et les autres professionnels de santé compétents en obstétrique, comme les médecins gynécologues obstétriciens et les Pédiatres en nombre suffisant dans toutes les régions du pays jouant un rôle majeur.
Un autre facteur de progrès a été la disponibilité de traitements sûrs et fiables pour lutter contre les principales causes de décès maternel notamment les infections, l’hémorragie de la délivrance ou l’hypertension, qui constituent trois des principales causes de décès maternel. Des médicaments permettant de traiter ces complications sont disponibles dans tous les centres entièrement équipés assurant la gratuité de la césarienne. Aujourd’hui, des traitements sont disponibles pour la plupart des causes de décès maternel dans tous les centres de santé grâce à la conjugaison des efforts des partenaires de la santé (auxquels je réitère mes remerciements) pour leur union afin d’assurer la survie des femmes.
Des stratégies ont été développés pour permettre à au moins 95 pour cent des enfants de 0- 5 ans et les femmes rurales à bénéficier des campagnes de vaccination contre la rougeole et d'autres maladies infantiles, et aux familles de disposer des moustiquaires traitées à l'insecticide.
Le Niger est considéré comme le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé au monde. La dernière enquête démographique et de santé du Niger EDSN-V 2017 réalisée, révèle une baisse de ce taux. Désormais, le Niger est engagé sur une bonne trajectoire vers la réalisation des conditions de la transition démographique :
En somme, différentes interventions à haut impact permettent actuellement d’améliorer l’état de santé de la mère et de l’enfant aux différents stades de sa vie féconde et cela par des stratégies de déploiement au bénéfice de tous. Tout cela a concouru indéniablement à la réduction des décès maternels et des enfants.
La Roue de l’Histoire : La question de la santé universelle figure parmi les promesses faites aux Nigériens par le Président de la République, qui a d’ailleurs abordé la question à Gaya en octobre 2022. A quel stade se trouve le projet actuellement ?
Il faut dire que la volonté politique affichée au plus haut niveau est déjà un atout majeur pour la réforme en question. Le souhait de la mise en place du Régime d’Assurance Maladie Universelle (RAMU) couplé au renforcement d’un régime assistanciel pour les plus démunis par le chef d’Etat est favorable à une mobilisation de tous pour aller vers la Couverture Santé Universelle (CSU) notamment les détenteurs d’enjeux ou des Partenaires Techniques et Financiers (PTF).
Cet agenda légitime et ambitieux de la marche vers la CSU à travers un régime contributif organisé de la population est confronté à une multitude de défis et de contraintes en termes économiques, institutionnels, politiques et techniques, particulièrement dans les pays en développement, y compris l’Afrique de l’Ouest. Un de ces défis majeurs au Niger demeure la prépondérance de l’emploi informel sur le marché du travail. Son poids hypertrophié dans l’économie a un impact négatif, entre autres, sur l’assiette fiscale et le recouvrement des impôts ainsi que sur les possibilités d’adhésion et de contribution à des régimes d’assurance maladie.
Du coup, il s’agit d’un système d’extension progressif impliquant tous les secteurs et beaucoup d’acteurs au regard des enjeux et de tous les déterminants de la santé et comme on dit : « Les plus grands voyages commencent avec un premier pas ».
Tout en menant la réflexion d’ensemble sur le développement d’un projet de Régime d’Assurance Maladie Universelle couplé au renforcement d’un régime assistanciel, d’un point de vue opérationnelle :
- Des éléments déterminant pour un succès d’une politique de RAMU sont entrain d’être mis en œuvre de manière effective, efficace et sans heurts avec toutes les parties prenantes donnant l’impression légitime d’une certaine lenteur ou inaction.
- Les pires ennemis traditionnels de ce type de réformes sont : la précipitation, le laxisme de l’Administration et l’absence de ressources et de prérequis nécessaires avant le lancement effectif. Nous cherchons à éviter les risques liés à la précipitation et à l’absence de prérequis, quitte à retarder l’ouverture des droits de quelques mois. Ce qui ne représente pas en soi-même une longue période pour un projet d’une telle envergure et d’une telle complexité !
- Le travail sur les textes d’application n’est pas à sous-estimer, car il permettra au Gouvernement d’appliquer la Loi sur le RAMU. Ces textes porteront notamment sur : la gestion de l’Assurance Maladie, l’affiliation, l’immatriculation et le recouvrement des cotisations, la délégation de certaines fonctions de gestion de l’assurance maladie, le conventionnement et système de tiers-payant, les listes des bénéfices (panier de soins, liste des médicaments remboursables, dispositifs médicaux admis au remboursement, nomenclature des actes médicaux et de biologie…), le contrôle médical, la liste des pathologies lourdes à prise en charge spéciale…
Au stade actuel :
Des Textes essentiels ont été déjà adoptés :
- La loi N° 2018 –22 du 27 Avril 2018, déterminant les principes fondamentaux de la protection sociale,
- La loi N° 2022-34 du 11 juillet 2022 sur les principes fondamentaux de la santé
- Le décret n° 2021-583 /PRN/MSP/P/AS du 23 juillet 2021 portant adoption de la Stratégie Nationale de Couverture Sanitaire Universelle au Niger (SNCSU 2021-2030) en application de laquelle le décret portant création, missions, composition et fonctionnement des organes de pilotage est adopté et
- La création de l’Institut National d’Assistance Médicale (INAM), Etablissement Public à caractère Social est créé par décret N°2021-786/PRN/MSP/P/AS du 23/09/2021 transformé d’EPS en EPA au cours du conseil de ministres du 12 Janvier 2023.
L’INAM a pour mission la mise en œuvre des politiques, stratégies et réformes relatives au financement et à la gestion déléguée de la prise en charge par l’Etat et par les Collectivités Territoriales des gratuités de soins au profit des populations vulnérables et pauvres du Niger
Parallèlement les leçons apprises des expériences en RAMU mises en œuvre sont exploitées notamment :
L’Assurance Médicale Départementale (AMD) de Gaya pour laquelle les affiliations, depuis le 07 novembre 2022 ; Pour cela :
- Les principes de base, les orientations stratégiques et les options de l’architecture d’ensemble de l’AMD ont été définis et validés en atelier ;
- Les principaux paramètres techniques et financiers ont été définis, notamment le paquet des prestations de base c’est-à-dire le panier de soins à couvrir, la liste des médicaments remboursables, la segmentation des cibles, les fourchettes de primes, les modalités d’affiliation, les modalités de prise en charge des personnes vulnérables, les sources de financement ainsi que la coordination et la gestion du système.
- Les options de financement de l’AMD s’approfondissent progressivement pour une meilleure projection jusqu’en 2026 ce qui constitue l’essence même de notre nouveau Plan de Développement Sanitaire et Social 2022-2026 adopté en Conseil des Ministres le 23 Février dernier en vue d’accélérer la marche vers la CSU.
On peut noter la mise œuvre du Financement basé sur les Résultats dans douze (12) Districts Sanitaires à Tillabéry et la perspective de mise en œuvre de la même stratégie par le Projet Lahiya Iyali à Maradi et Zinder qui viendront conforter tout ce processus pour l’amener à sa maturation.
Aussi des campagnes de sensibilisation sont en cours pour inciter les populations à adhérer au système.
Le renforcement de l’approche multi sectorielle à travers des Systèmes d’information sanitaire, d’enregistrement civil et identifiant unique de concert avec tous les dispositifs existants notamment le Registre Social Unique sont en train de se mettre en place.
Permettez mois de noter ce qui est le plus important dans ce processus et qu’on oublie de noter souvent peut être par méconnaissance c’est la mise à niveau de l’offre de soins qui est entrain de se faire de manière invisible peut être ; Il faut dire qu’un des facteurs importants de réussite de l’agenda CSU, et particulièrement de la couverture du secteur informel est sans aucun doute la mise à niveau de l’offre de soins en termes aussi bien de quantité que de qualité. Trop souvent, la question de CSU est vue comme une question de couverture financière. Mais donner aux populations une couverture sans assurer l’accès à des services de qualité est insuffisant et peut même avoir des effets pervers. Cela permettrait non seulement d’attirer un nombre très important de bénéficiaires et de les maintenir dans les régimes qui les couvrent, mais aussi d’atténuer les coûts associés à l’absence de qualité des soins (surmortalité, complications, handicaps…). Les résultats de cet important travail sont rappelés ci haut notamment l’extension progressive de la couverture sanitaire, le renforcement de la participation communautaire, le renforcement de la capacité opérationnelle des Centres de santé à tous les niveaux de la pyramide sanitaire tant en équipement, qu’en personnel et en approvisionnement continue en produits de santé.
Enfin notons, des efforts de recherche d’un accompagnement des PTF aligné sur les priorités nationales sont également intensifiés, en somme l’architecture du RAMU est bien définie et les étapes préalables nécessaires progressivement réalisées afin de réussir financièrement et techniquement le processus.
La Roue de l’Histoire : La politique de la gratuité des soins pour les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq (5) ans est souvent sujette à des incompréhensions voire des critiques de certains usagers qui estiment qu’elle est illusoire. Que dites-vous par rapport à ces reproches ?
Effectivement, comme beaucoup de pays d’Afrique, le Niger met en œuvre, depuis 2006, la mesure de la gratuité des soins de santé. Celle-ci consiste à rendre gratuit pour certaines catégories de la population, particulièrement les enfants de moins de cinq (5) ans et les femmes, des prestations de services de santé sans paiement à savoir : la planification familiale, la consultation prénatale, la césarienne/grossesse extra utérine/rupture utérine, et le cancer gynécologique. Quant aux enfants de moins de cinq (5) ans, la gratuité des soins concerne tous les soins préventifs et curatifs.
Ce qu’il y a lieu plutôt de voir ce sont les gains sanitaires en termes de réduction de morbidité, de mortalité pour cette frange de population très vulnérable ; Cette politique de la gratuité des soins de santé au Niger courageusement maintenue malgré l’insuffisance des ressources est d’une grande portée politique en matière de couverture du risque maladie à la population et d’équité en santé ; Notons qu’elle a permis d’améliorer significativement l’accès des populations vulnérables aux soins et services de santé et qu’à l’heure actuelle deux consultants sur trois dans nos formations sanitaires sont des cibles de cette gratuité qui a significativement amélioré la fréquentation des formations sanitaires par les populations et qu’on se rappelle est associée à la réduction de taux de mortalité maternelle et des enfants de 0 à 5ans ayant permis au Niger d’atteindre l’OMD 4.
Au vu de la large cible couverte et des paquets de bénéfices, il est évident que la gestion d’un tel système dans un environnement non dématérialisé en termes d’immatriculation des bénéfiaires, de gestion des prestations et de vérification présentera à la longue des insuffisances. Et c’est en réponse à tout cela que nous avons créé l’INAM pour un meilleur suivi de la politique de gratuité des soins de santé. Cette agence pour laquelle l’opérationnalisation suit son cours normal sous mon bienveillant regard a pour objectif de professionnaliser la gestion de la gratuité des soins.
La Roue de l’Histoire : L’accès aux soins de santé, c’est aussi les activités mobiles et foraines que votre département ministériel a initiées. Quelles sont les actions qui ont été menées dans ce sens en 2022 et sur quoi ont-elles portées ?
Il faut rappeler que l’organisation et le fonctionnement du système de santé au Niger est basé sur les principes des Soins de Santé Primaires (SSP) définis lors de la conférence de Alma Ata en 1978, et renforcés par plusieurs engagements internationaux tel que la Déclaration d’Astana sur les SSP (le nouveau concept des SSP tel que défini dans la « Vision des SSP pour le 21ième Siècle) et régionaux auxquels le Niger a souscrit tels que la Déclaration sur le scénario de développement sanitaire en trois (3) phases, la Déclaration sur l’Initiative de Bamako et la Déclaration de Ouagadougou sur la relance des SSP.
L’accélération des progrès vers la CSU et l’amélioration des indicateurs sanitaires du Niger se heurte au problème de la couverture sanitaire. La première exclusion est la distance supérieure à 5 kilomètres que doit parcourir 47 % de la population pour accéder à un paquet de soins complets.
Un objectif prioritaire du Ministère de la Santé Publique, de la Population et des Affaires Sociales est donc d’accroitre la part de la population vivant loin d’une structure bénéficiant un paquet complet de soins.
L’offre de soins, projetée à travers les stratégies foraines et avancées mais aussi les campagnes de masse, a été repensée en vue de maximiser l’offre de services au point de contact et à travers la mise en œuvre des programmes nationaux comme celui de la chirurgie foraine et autres interventions liées à la chirurgie de la fistule obstétricale en région.
Ces réformes en plus d’améliorer les performances du système ont contribué à en renforcer l’efficience.
Ces stratégies hors des murs s’appuient de manière accrue sur les relais communautaires pour renforcer leur rôle de relais des structures sanitaires (Distribution à Base Communautaire et de la Campagne de Prophylaxie Saisonnière (CPS), relais des traitements de prise en charge de la malnutrition par les RCom offrant le paquet de soins complets…).
D’un point de vue plus spécifique, les grandes évolutions de la prise en charge par pathologie ont été :
- en matière de prise en charge de la malnutrition aigüe : la poursuite de la prise en charge avec des axes de travail clef sur la simplification des protocoles, la décentralisation de la prise en charge, notamment vers les Cases de Santé,
- dans la lutte contre le paludisme :
- en matière de prévention, poursuite de la stratégie CPS et poursuite des distributions de MILDA, en privilégiant des approches combinées de ces activités,
- en matière de prise en charge cela a permis d’assurer une disponibilité permanente en médicaments et produits de prise en charge des cas tout en maintenant l’effort du renforcement de la formation continue des prestataires en zone rurale.
La Roue de l’Histoire : Vous avez pris souvent des mesures jugées quelque peu «impopulaires» dans les affectations des nouveaux agents recrutés par votre ministère. Cette politique vous a-t-elle permis d’atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés ?
Permettez-moi de faire état du diagnostic sans concession sur la situation d’alors du système de santé à ma prise de fonction notamment :
- L’insuffisance dans la mise en œuvre de plusieurs réformes du secteur de la santé ;
- Le déficit notoire en ressources humaines et le fort déséquilibre régional ;
- Une gouvernance insuffisante du système de santé ;
- Une offre de santé inégale et ne répondant pas aux besoins des citoyens ;
- Des ressources financières en deçà des besoins du secteur ;
Au vu de tous ces défis, ma conviction profonde, est qu’il faut que notre système de santé réponde aux besoins et aux attentes d’une population, et donc partir des besoins avant de concevoir une offre ;
Pour moi Il est grand temps de se mettre au travail et d’arrêter de faire de beaux discours et de prendre des décisions. Sur les résultats, je voudrais surtout souligner que les reformes sont un combat de tous les jours, les engager ne suffit pas, il faut les suivre, les évaluer, les adapter… bref les faire vivre. Dans ce cadre, le travail et le mérite ne reviennent pas au Ministre mais à ses équipes, à leur capacité à s’engager, à construire des alliances pour les supporter, à dépasser les difficultés de tous les jours, à tenir bon et cela je remercie tous les cadres du Ministère de la Santé Publique, de la Population et des Affaires qui œuvrent pour cela.
Les réformes engagées depuis ma prise de fonction sont multiples. Vous en avez cité certaines. Permettez-moi d’indiquer effectivement que certains dispositifs ont été mis en place pour améliorer la ponctualité des personnels soignants. Au cours des dernières années nous avons beaucoup progressé sur la densité des ressources humaines afin que le système de santé rende le service qu’il doit rendre partout sur le territoire. Il faudrait un rééquilibrage de la distribution du personnel pour donner la même chance à tout le monde. Les affectations du personnel issus des recrutements passés ont permis de réduire la précarité des ressources humaines de santé. Cela a nécessité un dialogue permanent avec les syndicats du secteur tout naturellement ; Il s’agit là d’une victoire dans un processus de longue haleine…
Le déséquilibre doit être réduit entre zones urbaines et rurales ; Il en est de même sur la mobilisation de communautés et des Partenaires Techniques et Financiers pour l’appui en Ressources Humaines.
C’est un ministère qui est au service du quotidien des gens, dans leurs besoins les plus fondamentaux, notamment de protection sanitaire. Son objectif est de mettre en œuvre une protection sociale qui s’approche le plus possible des besoins des personnes.
Je connais aussi bien les besoins de nos concitoyens en matière de santé que les solutions envisageables de par mon parcours professionnel. Ce sont des enjeux que je maîtrise très bien techniquement. Mes compétences me permettent de mieux définir et orienter les problèmes de santé publique.
Et pour cela nous venons de rédiger le Plan de Développement Sanitaire et Social (PDSS) 2022-2026 arrimé au Plan de Développement Economique et Social.
Ce PDSS à la fois pragmatique et stratégique a comme priorité d’accélérer la marche vers la couverture sanitaire universelle c’est-à-dire que chacun puisse accéder à des soins de qualité sans préjudices financiers. Cela passe par un renforcement du niveau opérationnel.
Les acteurs de première ligne et la délivrance des soins de santé primaire sont notre priorité. L’amélioration de l’offre de soins de proximité se double de deux reformes clefs : le développement des ressources humaines en quantité et en qualité ainsi que leur gestion notamment leur rétention dans les zones rurales ce qui n’est pas chose aisée dans un contexte de forte féminisation des agents de santé et nos normes sociales. Mais ce travail de répartition équitable des ressources humaines doit permettre d’améliorer l’accès aux soins pour tous. Ici aussi les succès ne doivent pas empêcher le constat du chemin qui reste à parcourir et la nécessité d’aligner chacun sur ces priorités en laissant de côté les considérations politiques, pour pouvoir permettre l’accès à la santé au plus grand nombre. Si c’est cela « l’impopularité » je l’assume avec fierté avec le sentiment d’avoir fait du bien à tous quand je regarde qu’auparavant le déséquilibre notoire de certains catégories de personnel entre Niamey et les 99 % de l’essentiel des populations nigériennes, je ne peux que m’en réjouir ; Aujourd’hui grâce à ces efforts chaque région dispose d’au moins sept à 8 Médecins Gynécologues-Obstétriciens, Chirurgiens Généralistes ou Pédiatres contrairement à un passé récent où toutes les régions n'en disposaient invariablement que d’un agent pour ces catégories de personnel rendant du coup inaccessible les soins. L’objectif est clair, à terme, plus aucun nigérien ne doit tomber dans la pauvreté ou retarder ses soins du fait d’une mauvaise répartition du personnel.
Pour cela la bonne gouvernance continue de constituer un axe de travail prioritaire. Nous sommes entrain dans ce sens de recruter sur les hautes instructions du Chef de l’Etat des catégories de personnel spécialisé dans des domaines dit rares pour servir exclusivement en dehors de Niamey.
Les objectifs sont atteints car, auparavant, le déséquilibre entre zones urbaines et rurales, qui regroupent plus de 80% de la population, était fortement marqué. 75% du personnel de santé travaillant en zone urbaine contre 25% en zone rurale selon un audit Organisationnel et Fonctionnel du Ministère de la Santé Publique. Le dernier rapport issu du Conseil Technique National de Santé 2022 présente une situation nettement améliorée en termes de répartition des ressources humaines. C’est ainsi qu’en 2022, 62% servent en milieu urbain contre 38% en milieu rural et qu’aucun Centre de Santé Intégré ne dispose d’un seul agent.
Personnellement, je ne supporte pas de construire un système de santé, en laissant de côté les personnes vulnérables. Dans une société moderne, l’Etat doit protéger tous ses citoyens avec une égalité des chances. Ma préoccupation est d’amener tout le monde à un même accès à la santé.
Il est vrai que les Nigériens ont le sentiment par moment ou par endroit d’être délaissés en termes de présence de soignants. Selon certains, le système de santé nigérien ne rend pas le service qu’il doit rendre partout sur le territoire. Il faudrait un rééquilibrage pour donner la même chance à tout le monde.
Mes priorités sont la mise en œuvre des orientations de SE le Président de la République qui ciblent une refonte globale du système national de santé ;
Pour cela je partage au quotidien sa vision « d’un Niger dans lequel la santé et le bien-être des populations sont les plus élevés possible à travers un système de santé performant, accessible à tous et résilient ».
Interview réalisée par Adoum Boulkassoum (La Roue de l’Histoire)