La montée de la surenchère de la transition militaire au pouvoir à Niamey commence peut-être à porter ses fruits. Il y a aussi probablement ces missions de bons offices menées par des bonnes volontés ainsi que des bénévoles qui, nuit et jour, ont expliqué la situation de crise mais surtout les risques de la cassure définitive de l’espace communautaire qui se pointe à l’horizon. C’est du moins l’impression que donne la nouvelle orientation qui se dessine depuis quelque temps dans les rapports entre le Niger et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
La nouvelle attitude de l’organisation sous-régionale ressemble beaucoup plus à un appel de pied. Les autorités de la transition, qui ont multiplié les missions de bons offices et offensives sur tous les plans, mesurent manifestement la portée de leur piège et de leurs messages. Si du côté de l’Europe, c’est l’arme migratoire que le général Tiani et son équipe lâche, pour l’espace communautaire, la création de l’Alliance des Etats du Sahel(AES) ainsi que la volonté de ses membres d’aller vers une monnaie commune ont suffi de perturber le sommeil de certains chefs d’Etat de la CEDEAO au départ intolérants et belliqueux face au coup d’état militaire au Niger.
En première ligne, les soutiens du CNSP citent l’Ivoirien Alassane Dramane Ouattara qui ne pourrait pas être sain quant à l’envoi du gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) à descendre à Bamako où il s’est entretenu avec les représentants des gouvernements ‘’en rébellion’’.A Abuja, siège de l’institution ouestafricaine, où après l’accueil de la création du nouvel espace tripartite on reste prudent mais aussi froid, les esprits commencent à se calmer et les tensions à s’apaiser. En tout, la nouvelle position de la Cedeao constitue un autre pas de plus, même si l’organisation réaffirme récemment encore avoir seulement suspendu mais pas écarté son option d’intervention armée contre les auteurs du putsch nigérien. Le ton a drastiquement changé face à cette posture engagée par le Burkina Faso, le Mali et le Niger qui risque, à la longue, de faire disloquer la Cedeao.
Dans un rapport sur l’état de mise en œuvre des dispositions communautaires, le président de la Commission de la CEDEAO, le Gambien Omar Alieu Touray a fait un clin d’œil au Niger qu’il a même essayé de caresser dans le sens du poil. Sa sympathie tout azimut vis-à-vis du Niger ressemble bien à une action de fiançailles où la CEDEAO cherche à reconquérir le cœur d’un membre fondateur de taille qui, chaque jour un peu plus, expose son désamour et sa lassitude d’une vie conjugale insupportable, s’écarte et s’éloigne de la trajectoire communautaire, orientant désormais ses choix politiques vers d’autres prétendants, soit d’autres terres qu’il estime promises. «Quelle que soit la mesure prise par la CEDEAO, laquelle affecte la population du Niger, elle nous affecte également», tempère le diplomate à l’endroit du Niger que l’institution tente d’amadouer.Plus loin, on ne semble pas lâcher ce membre, du moins ce morceau qui, lui, tourne progressivement le dos pour aller voir ailleurs. «Le Niger reste membre de la Communauté de la CEDEAO et tout ce qui affecte le peuple nigérien préoccupe la CEDEAO et les dirigeants de la CEDEAO», ajoute-t-il.
Quatre mois plus tard, la maison commune d’Abuja exprime ses préoccupations relativement à la détérioration de la situation socio-économique du Niger mais surtout avec ses relations avec certains pays membres dont le géant Nigeria avec qui il partage une frontière longue de 1500km, avec les mêmes populations des deux pays de part et d’autre.Même si aucune sanction n’est pour l’instant levée, les derniers développements de la situation et la nouvelle orientation politique du Niger augurent des perspectives prometteuses, notamment le rétablissement de la considération et du respect de la part de ses partenaires extérieurs dont beaucoup sous-estiment et chantent le degré de pauvreté au fil des ans.
Mamane Abdou