Mali, Guinée, Burkina Faso et Niger voilà quatre (4) pays tous francophones de l’Afrique de l’Ouest dirigés par des juntes militaires censées remettre le pouvoir aux civils après des transitions qui en principe ne devraient pas excéder deux (2) ou tout au plus trois (3) ans conformément aux professions de foi des responsables de ces différents régimes militaires.
Plus le temps passe, plus les peuples voient l’horizon s’éloigner pour le retour des civils au pouvoir. Un constat qui commence d’ailleurs à agacer les citoyens surtout dans les pays où les militaires sont dans leur 3ème voire 4ème année de gestion des affaires publiques. C’est le cas du Mali où la boulimie du pouvoir des colonels conduit le pays vers un vide institutionnel. En se référant au décret pris par le Colonel Assimi Goïta en personne et sans pression aucune, la transition militaire dans ce pays devrait prendre fin le 26 mars 2024 avec l’organisation d’une élection présidentielle.
A la grande surprise des maliens, l’élection présidentielle n’a pas eu lieu et plus grave aucun décret n’a été pris par Assimi Goïta pour proroger la durée de la transition à la même date du 26 mars 2024. Du coup, le pays tombe désormais dans un vide institutionnel selon plusieurs responsables politiques. Partant de ce constat, les partis politiques et les structures de la société civile se sont exprimés à travers une déclaration en date du 31 mars 2024 pour exiger du gouvernement de la transition l’organisation d’une élection présidentielle qui remettra le pouvoir aux civils dans un meilleur délai. Ils ont annoncé par la même occasion qu’ils feront recours à toutes les voies légales et légitimes pour le retour du pays à l’ordre constitutionnel normal et dans le concert des nations, gage de la stabilité politique et du développement durable du Mali.
Une transition sans fin, c’est ce à quoi, le général de corps d’armées Mamadou Doumbouya veut plonger la Guinée. Au pouvoir depuis septembre 2021, le tombeur du Pr Alpha Condé ne s’apprête pas à lâcher le pouvoir après presque trois (3) ans de magistère. Le 27 mars dernier, il a démis de leurs fonctions les présidents des conseils municipaux et des villes en autorisant les secrétaires généraux de gérer les affaires courantes en attendant la nomination des administrateurs délégués.
Le lendemain de cette décision, le nouveau Premier Ministre de la transition nommé tout récemment annonçait le 28 mars 2024, la prolongation de la transition sans pour autant préciser cette fois-ci sa durée pour motif que le temps n’a jusque-là pas permis d’achever toutes les réformes nécessaires avant la remise du pouvoir aux civils.
Les signes avant-coureurs au Sahel
La création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) le 16 septembre 2023 et la sortie de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) le 31 janvier 2024 par le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont constitué des signes annonciateurs pour les militaires de rester au pouvoir.
Si au Mali, la volonté des colonels de s’incruster au pouvoir ne souffre d’aucune ambiguïté, chez les deux autres membres de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) à savoir : le Burkina et le Niger les signes avant-coureurs sont aussi là. On entend çà et là et surtout sur les réseaux sociaux, pas d’élections avant le retour de la sécurité dans ces pays ; ce même argument développé par Assimi Goïta et ses amis colonels juchés sur la colline de koulouba.
Le capitaine Ibrahim Traoré n’entend même pas parler d’un quelconque retour à l’ordre constitutionnel normal au Burkina Faso. Au pays des hommes intègres critiqué la transition est synonyme d’un crime de lèse-majesté. Tous se qui se sont hasardés à dénoncer les insuffisances ou la mauvaise conduite de la transition sont convoyés manu-militari sur les théâtres des opérations avec statuts des Volontaires de la Patrie (VDP), cette milice créée localement par les populations elles-mêmes pour organiser leur défense face aux terroristes.
Au Niger, dernier pays à rejoindre le club, le retour à l’ordre constitutionnel normal semble être renvoyé aux calendes grecques. Lors de ces deux (2) premières sorties médiatiques, le Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), Chef de l’Etat, le général de brigade Abdourahamane Tiani a laissé entendre que la transition n’excédera pas trois (3) ans. Sauf que ces deux adresses du président Tiani à ses concitoyens étaient intervenues pour la première avant l’avènement de l’AES et pour la seconde avant le retrait du Niger de la CEDEAO.
Sa toute dernière sortie médiatique en date du 13 février 2024, l’homme fort de Niamey n’a même daigné prononcer un mot sur la durée de la transition. Aborder cette question permettra aux nigériens de savoir s’il campait toujours sur la durée ne dépassant pas les trois (3) ans ou s’il envisage une durée un peu plus longue. Le black-out total sur cette question commence à semer de doute au niveau de l’opinion publique sur la possibilité d’un éventuel retour à l’ordre constitutionnel. La situation politique qui prévaut actuellement dans le pays où malgré la levée des sanctions économiques de la CEDEAO, aucune avancée n’a été enregistrée dans la mise en place des autres institutions de la transition tels que le Conseil National de Transition ou parlement de la transition, l’Observatoire Nationale de la Communication voire même les assises nationales dont la tenue a été annoncée aux premières heures de l’avènement du CNSP commence à interpeller la conscience de certains citoyens. C’est le cas de Transparency international section du Niger qui dans une déclaration a lancé un appel aux citoyens pour exiger le retour à l’ordre constitutionnel.
Selon certaines indiscrétions, la délégation américaine de haut niveau qui a séjourné tout récemment dans notre pays aurait demandé un calendrier pour un retour à l’ordre constitutionnel, une demande qui n’a pas plus au pouvoir de Niamey et aurait accélérer d’ailleurs la dénonciation des accords militaires avec le pays de l’oncle Sam.
Vers la fin des transitions militaires en Afrique Centrale
Lorsqu’en Afrique de l’Ouest les régimes militaires veulent s’éterniser au pouvoir, les lignes semblent bouger en Afrique Centrale.
Après trois (3) ans de transition suite au décès de son défunt père et son arrivée au pouvoir qui a été assimilée à un coup d’Etat au Tchad, le général Mahamat Idriss Déby organisera l’élection présidentielle à laquelle il est d’ailleurs candidat pour le 6 mai prochain.
Au Gabon, un autre pays du bloc Afrique Centrale qui a enregistré un coup d’Etat en Août 2023, deux semaines seulement après celui intervenu au Niger, le tombeur de Ali Bongo Odimba est dans une logique d’organiser des élections et remettre le pouvoir aux civilx après une transition qui ne durera pas plus d’un an.
Ibrahim Moussa