La crise diplomatique entre le Niger et le Bénin a pris une autre tournure ces derniers jours. La semaine passée, les autorités béninoises ont fustigé ce qu’elles ont qualifié du manque de respect en matière diplomatique, suite au refus du Président nigérien de recevoir le ministre des mines dépêché spécialement par le Président Patrice Talon chez son voisin nigérien.
Ce mardi 5 juin 2024, c’est le tour des membres d’une délégation des officiels nigériens conduite par la Directrice Générale Adjointe de WAPCO NIGER, Mme Sodangui Ibrah Hadiza d’être arrêtés et conduits muni militari devant un procureur spécial de la CRIET ( Cour de Répression des Infractions Economiques et Terrorisme).
Une escalade qui a exigé des deux parties de se prononcer pour éclairer la lanterne des citoyens des deux (2) pays dont les relations continuent de se dégrader depuis le coup d’Etat intervenu au Niger en juillet 2023.
Dans une déclaration de presse en date du 5 juin 2024, le procureur spécial de la cour de répression des infractions économiques et du terrorisme au niveau de Cotonou fait cas des informations de sources digne de foi qui lui sont parvenues faisant état des personnes qui se sont frauduleusement introduites sur le site de la station terminale WAPCO BENIN Sémè-Kpodji.
« Des investigations menées sur place, il ressort ce qui suit : Cinq ressortissants nigériens se sont introduits sur le site sans décliner leur identité. Au lieu d’emprunter l’entrée principale et de s’enregistrer à la guérite, ces personnes ont préféré une entrée dérobée située à l’arrière du site… », a laissé entendre le procureur spécial de la CRIET.
Face à cette arrestation des officiels nigériens partis pourtant pour superviser le chargement d’un navire du brut nigérien, la réaction des autorités béninoises visiblement perçue par les responsables nigériens comme une réponse du berger à la bergère, ne se pas faite attendre.
Niamey a étalé toutes les justifications qui prouvent que cette arrestation est illégale car foulant du pied tous les accords entre les deux pays.
Le Ministre du pétrole, Mahaman Moustapha Barké Bako et son homologue de la justice, Alio Daouda ont conjointement animé un point de presse le jeudi 6 juin 2024.
Les deux membres du gouvernement ont dénoncé ce qu’ils ont qualifié d’arrestation sans raisons valables des responsables nigériens au Bénin.
Mahaman Moustapha Barké Bako a démontré que cette arrestation est faite sans raison valable avant d’indiquer que sur instruction du Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), Chef de l’Etat, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani, le poste initial du brut de Koulélé à Agadem sera fermé tant que les responsables nigériens n’ont pas été libérés.
« Des équipes ont été arrêtées par l’armée béninoise. Ils ont pris leurs téléphones et sont partis avec eux. Nous ne savons même pas où ils se trouvent. C’est à minuit que nous avons pu entrer en contact avec le directeur de WAPCO, qui m’a passé au téléphone la directrice adjointe. Je lui ai demandé quelle était la situation. Elle m’a rassuré sur le fait qu’ils n’avaient subi aucune maltraitance, mais qu’ils attendaient de voir ce qui allait se passer. Depuis minuit, nous n’avons plus eu de nouvelles d’eux. On nous a dit qu’ils n’ont pas été arrêtés, mais simplement interpellés », a déclaré le ministre Mahaman Moustapha Barké Bako.
Le Ministre de la Justice Garde des Sceaux, Alio Daouda a qualifié, à son tour, l’arrestation de la Directrice Générale Adjointe de WAPCO NIGER et 4 autres membres de la délégation a été faite en violation flagrante de l’accord entre les deux pays.
Le pétrole, moyen de pression des autorités Béninoises
Méfiantes envers le Bénin et son président PATRICE Talon, depuis la fermeture des frontières ordonnées par la CEDEAO suite aux évènements du 26 juillet 2023, les autorités nigériennes sont restées constantes dans leur position, en continuant de prendre leur distance vis-à-vis de ce pays voisin qu’elles accusent de servir de base arrière à la France pour déstabiliser le Niger.
N’ayant pas réussi à convaincre les autorités nigériennes à rouvrir leur frontière, le Président Talon est en train de se servir de son port de Sémè Kpodji, où est transporté le brut nigérien vers le marché international.
Le 10 mai dernier, sur instruction du président béninois, les autorités portuaires ont bloqué pendant plusieurs jours, le chargement du 1er navire devant transporter le brut nigérien sur le marché international. Il a fallu l’intervention des responsables chinois de la CNPC pour que Cotonou accepte finalement de lever le blocus à titre provisoire.
Ce mardi 5 juin 2024, le Bénin récidive avec cette fois-ci l’arrestation de la directrice générale adjointe de WAPCO Niger et ses coéquipiers qui ont été arrêtés et séquestrés sur le même site où les navires devant transporter du brut nigérien sont chargés.
Avec cette deuxième escalade entre les deux pays autour du chargement du brut nigérien, tout laisse croire que le pétrole nigérien est désormais devenu le moyen de pression des autorités béninoises envers le voisin Nigerien.
Ibrahim Moussa