Le sommet des Chefs d’État de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest se tiendra le 15 décembre prochain à Abuja au Nigeria. L’une des questions cruciales à aborder au cours de ces assises est d’entériner l’acte de retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la communauté. Décision douloureuse qui partagent les Chefs d’État et les populations des États membres, totalement embarrassés de voir s’éclater une organisation vieille de 49 ans. A quelques jours de cet ultime sommet, presque toutes les tentatives de médiation ont échoué, les pays de l’AES restant hermétiquement sur leur position de retrait. Pour autant toutes les portes ne sont pas fermées. Une réconciliation est possible pour sauver l’organisation qui a fait ses preuves et qui demeure aujourd’hui une référence en matière de réussite d’intégration régionale. L’abandon du protocole additionnel source de toutes les tensions et revenir à la version originelle de la CEDEAO, celle des pères fondateurs, semble être une option pour la réconciliation et que pourraient poser les pays de l’AES pour sauver les meubles.
Après quarante-neuf (49) ans d’existence, la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) jouera son destin le 15 décembre 2024 à Abuja à l’occasion du sommet des Chefs d’État. Trois pays, Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont claqué la porte à l’organisation communautaire le 28 janvier 2024. A l’origine de la crise, les menaces d’intervention militaire de la CEDEAO à la suite du coup d’état intervenu au Niger le 26 juillet 2023, afin de rétablir le Président déchu dans ses fonctions, ainsi que les sanctions financières et économiques punitives prises conjointement par la CEDEAO et l’Union Economique et monétaire Ouest Africaine (UEMOA) pour faire plier les militaires qui ont pris le pouvoir au Niger. La CEDEAO se fondait sur le protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité, pour justifier les batteries de sanctions prises et les menaces d’intervention militaires brandies à l’endroit du Niger.
Cette décision de la CEDEAO a été très mal comprise, non pas seulement par les dirigeants des pays de l’AES mais aussi par l’écrasante majorité des populations ouest-africaines.
Il apparaît clairement que la principale source de discorde qui a toujours ébranlé la CEDEAO dans la gestion de la crise nigérienne et qui a débouché sur sa fragilisation qui tend vers un éclatement est l’interprétation et la mise en œuvre du protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance. Depuis son adoption, ce protocole a beaucoup plus créé des problèmes qu’il n’en a résolu. A chaque fois qu’on y faisait recours pour ramener les dirigeants d’un pays membres à le respecter, les crises s’aggravent et les populations se divisent davantage. Même quand la CEDEAO parvient à faire plier les pouvoirs des pays en crise, les séquelles des divisions restent pour longtemps.
Pour autant, sur le plan économique, industriel, des transports, des télécommunications, de l’énergie, des ressources naturelles, du commerce, des questions monétaires et financières, des infrastructures, de la libre circulation des biens et des personnes, des projets communs d’intégration véritable, des passeports CEDEAO, pour ne citer que ceux-là, d’énormes efforts ont été accomplis faisant apparaître la CEDEAO comme un maillon, essentiel dans la création de la zone de libre échange continentale (ZLECAF). Point besoin de s’attarder sur les avantages d’appartenir à cette communauté. Les statistiques parlent d’elles-mêmes.
Aussi pour sauver l’organisation pour laquelle les pays de l’AES ont dépensé tant de temps et d’énergie, de compétence et d’argent et pour l’avenir de l’intégration africaine que tous les africains souhaitent à moyen terme, il est nécessaire que le Burkina Faso, le Mali et le Niger reconsidèrent leur position.
La politique de la chaise vide, de l’abandon, ne peut laisser la place à ceux qui veulent asservir et instrumentaliser la CEDEAO. Il serait donc plus judicieux de leur opposer des conditions pour un retour dans la communauté. L’exigence de l’abandon du protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité, ou tout au moins sa révision profonde pourrait être mis sur la table par les pays de l’AES. Ce serait une voie qui pourrait permettre la réconciliation au sein de la communauté fortement ébranlée aujourd’hui avec des impacts fortement ressentis par les populations dans tous les pays de la communauté.
Adoum Boulkassoum